30 juillet 2008
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Or donc, dans cette rame il faisait une chaleur de bête, les cravates fatiguées par une journée de travail mal thermostatée ne faisaient même plus semblant de s’aggriper aux cols des chemises et les déodorants avaient eux renoncé à tenter de couvrir les émanations bestiales des comptables cinquantenaires en surpoids. Les chemises auréolées quant à elles, se remettaient à peine du terrible sprint des horaires d'été de la gare de Bécon-Les-Bruyères, imposé par la nécessité de relier le quai le plus éloigné en moins d’une minute dans le but d’attraper une correspondance boiteuse, seul moyen d’éviter une attente inutile en plein cagnard de vingt bonnes minutes.
C’est à la gare de Clichy qu’a embarqué un sale type qui pendant le reste du trajet a fait profiter à la rame entière de l’interprétation exagérément sonore de quelques standards de la chanson française à l’harmonica.
Je pensais jusqu’alors que l’harmonica était comme la cornemuse un instrument tellement dissonant, qu’il n’était pas possible de mal jouer de l’harmonica : je me trompais, il est très possible de mal jouer de l’harmonica et c’est quelque chose de terrible.
Je pense que l’enfer ça doit être un peu comme ça, il y a des démons, des chaudrons, il fait une chaleur de bête, il faut courir pour attraper une correspondance pourrie en gare de Bécon-les-Bruyères, ça pue et il y a un type qui joue de l’harmonica, mal.