L’autre soir j’attendais une amie pour aller dîner devant la sortie du métro à Montparnasse.
L’ipod vissé aux oreilles, je regardais passer les gens.
Il n’y a rien de mieux que de regarder passer les gens dans la rue à Paris, un ipod vissé aux oreilles.
Etre immobile dans ce tumulte des gens qui se croisent, qui s’attendent, qui rentrent du boulot, qui se demandent où ils vont bien pouvoir aller dîner, c’est un peu comme si soudain on devenait le personnage principal d’un film à la bande originale particulièrement soignée.
Je ne sais pas pourquoi mais en général mon ipod a le don de choisir des morceaux qui vont bien avec ce qui se passe autour de moi, du coup là il a choisi le Personnal Jesus de Marylin Manson.
Marylin Manson - Personal Jesus
Un peu plus tôt, dans le grand couloir de Montparnasse, il avait choisi Schengen de Raphaël.
Raphaël - Schengen
J’aime bien ce grand couloir de Montparnasse un peu futuriste, là où a été construit ce magnifique tapis roulant atomique qui donne l’impression de voler mais qui ne marche jamais, fierté teintée de honte des ingénieurs de la RATP, et attraction rare des badauds souterrains qui viennent ici se distraire des gamelles en série des petites vieilles et des filles en talon.
Plus tard, alors que la nuit sera tombée sur Paris et que j’errerai à la recherche d’un taxi improbable, mon pod choisira Totem de Zazie, faisant ainsi, si l’en était besoin, la démonstration de ses goûts musicaux irreprochables.
Zazie - Totem
C'est bien simple, je ne sais pas comment on faisait avant l’invention de l’ipod quand on devait attendre une amie devant la sortie du métro à Montparnasse.
L’autre jour, je me suis aperçu par hasard qu’une collègue de travail se faisait appeler par un prénom qui n’était pas celui de son état civil.
C’est toujours amusant de se rendre compte de ce genre de coquetterie inspirée du monde des artistes.
J’adorerais vivre dans un monde où la société entière aurait emprunté les codes du Music Hall.
Le choix d’un pseudonyme, occuperait les enfants dès la classe de CP et ne serait plus l’apanage de quelques stars. Arrivé dans une entreprise on vous présenterait un à un vos nouveaux collègues : "Je vous présente Ricky Bravo, notre chef des ventes, Lova Barclay notre DRH et puis Freddy Lamour notre chef comptable".
La pratique de la Hola serait généralisée dans toute situation d’attente. Ainsi la longue file devant la poste de l’avenue de Clichy ne serait plus que vague rythmée par des "ho-ho-ho-ho-ho".
Lorsqu’on se rendrait à l’hôpital pour une crise d’appendicite, on commencerait par vous soigner un tout petit bobo en guide de première partie avant de vous infliger un entracte d’une bonne vingtaine de minutes pendant lequel vous feriez la queue dans une atmosphère enfumée pour aller chercher des bières. A peine ouvert un œil en salle de réveil, on vous endormirait de nouveau pour vous faire une petite rhinoplastie en guise de rappel.
Parfois au travail, en plein milieu d’une présentation PowerPoint vous entendriez au loin la voix d’un collègue ami qui, peu après, ferait son apparition à coté de vous et finirait la présentation avec vous en vous tenant par l’épaule avant de redisparaître en coulisses.
A la fin de cette présentation, quelqu’un vous apporterait un bouquet de roses, et puis vous iriez dîner avec toute l’équipe dans un restaurant à la mode, dans lequel vous seriez bien sur invité, avant de regagner la suite d’un grand hôtel parisien que vous saccageriez avec quelques amis qui auraient, comme vous, abusé d’un champagne millésimé commandé par caisses entières au room service par une attachée de presse anorexique et cocaïnée.
J’ai déjà parlé ici des trucs qui servent à rien mais que l’on fait quand même, comme par exemple appuyer sur le bouton qui appelle l’ascenseur alors que quelqu’un vient de le faire, ou bien décorer l'assiette d'un steak avec une feuille de salade.
Ces actes inutiles ne poursuivant aucun but, ne produisant aucun effet, sont parfois l’expression d’une petite névrose, comme quand on range les billets de 20 euros tous dans le même sens dans le portefeuille.
Parfois ils sont même un peu grotesques comme quand on ponctue une téléconférence regroupant une dizaine de personnes de quelques "hum hum" approbateurs.
Je me suis aussi souvent demandé ce qui poussait à lancer un "au revoir Messieurs Dames" à des inconnus chez le charcutier une fois que l’on s’est emparé de son poulet rôti (celui que l'on transporte dans un sac indestructible avec des grosses taches de gras).
C'est sans doute le même instinct de sociabilité que celui qui nous incite à la fin d’une soirée (ou d’un mariage) à scrupuleusement saluer tous les inconnus à qui on a pas adressé la parole de la soirée (ou du mariage).
Bref nos vies sont pleines d’actes inutiles, comme par exemple illustrer ce billet avec une chanson des années 20 qui n’a aucun rapport avec icelui, mais que j’aime bien.
Je n’ai jamais trop compris pourquoi, mais l’être humain, contrairement au manchot empereur, a besoin de maintenir une certaine distance entre lui et ses congénères (exception faite de quelques cas particuliers le samedi soir au macumba club).
Que ça soit dans le métro, dans la rue, au cinéma ou face à un urinoir collectif, nous faisons tout pour maximiser la distance qu’il y a entre nous et les inconnus qui se trouvent au même endroit (exception faite de quelques cas particuliers le samedi soir au macumba club).
La pénétration d’un étranger dans cette bulle devient vite intolérable et entraîne immanquablement des comportements de fuite ou d’agressivité.
Je n’ai jamais trop compris pourquoi chez certaines personnes (notamment le samedi soir au macumba club mais pas seulement) ce mécanisme se dérègle. Du coup ces gens ont tendance à vous parler en positionnant leur visage à environ huit centimètres du votre, ce qui en aucun cas, ne permet de maintenir la distance nécessaire entre congénères.
Ce dérèglement les pousse parfois à partager avec vous les détails les plus intimes de leur vie alors même que vous les connaissez à peine, ce qui de façon surprenante n’arrive jamais chez les manchots empereur même lorsqu’ils sont très saouls, le samedi soir au macumba club.
Aujourd’hui a été ce qu’on l’on peut appeler une RTT humide.
Pendant une RTT humide, il pleut tout le temps et beaucoup. Au début on se dit qu’on va attendre un peu que ça se calme avant de mettre le nez dehors, et comme ça ne se calme jamais vraiment, on se décide au bout d’un moment à braver les éléments.
Ce qui est étonnant avec la pluie, c’est qu’elle peut rendre ennuyeuse la ville la plus sublime. C’est le cas de Paris aujourd’hui.
Un jour de pluie c’est aussi l’occasion d’observer ce phénomène étrange selon lequel les parapluies font toujours en sorte de se trouver à l’endroit ou vous n’êtes pas. En l’occurrence aujourd’hui je dois constater l’accumulation de cinq parapluies au bureau et l’absence cruelle du moindre parapluie à la maison. C’est à se demander si les parapluies ne seraient pas un peu tire au flanc quand même.
Une balade dans Paris sous la pluie, c’est se méfier des bus qui semblent faire exprès d’atomiser en une redoutable gerbe les litres d’eau accumulés dans le caniveau.
Une balade dans Paris sous la pluie, c’est assez rapidement les pieds trempés et le froid qui va avec.
Une balade dans Paris sous la pluie, c’est aussi s’émerveiller de cette capacité qu’ont les arbres de vous mouiller encore alors qu’il ne pleut plus.
Une balade dans Paris sous la pluie, c’est enfin le bonheur de se retrouver chez soi, de constater avec joie qu’il n’y pleut pas et de s’émerveiller de l’apparition d’un arc en ciel en s’empifrant de pépitos.
L’autre jour en rentrant du boulot, j’ai croisé une fée à l’angle de la rue des Moines et de l’avenue de Clichy, une vieille fée un peu alcoolique avec un chapeau de fée et une robe de fée.
En fait je l’avais déjà croisée dans le quartier il y a quelques mois. A l’époque j’avais trouvé ça un peu étrange mais j’avais mis cette apparition sur le compte du surmenage.
Aujourd’hui j’en suis certain, il y a une fée qui habite dans la rue des moines.
En même temps je me demande ce qui peut bien faire qu’a 60 ans passés on décide de ressortir une vieille panoplie de fée pour aller déambuler dans la rue des Moines. Peut-être l’alcool et une très profonde solitude.
A moins, à moins qu’il y ait effectivement un passage vers le royaume des fées dans la rue des Moines.
J’ai retrouvé par hasard un stock de photos de classe de quand j’étais petit. Elles étaient à la cave, elles attendaient qu’on vienne les chercher en s’imprégnant de cette odeur caractéristiques des trucs qui ont été stockés à la cave.
C’est toujours rigolo de retrouver des photos de classe. D’abord parce que c’est un saut dans une autre époque et puis aussi parce qu’on redécouvre des visages oubliés depuis des années.
C’était toujours un événement le jour de la photo de classe : on avait été prévenu à l’avance, on vous avait fait mettre vos plus beaux habits. Le matin on préparait la cour de récréation en installant quelques rangées de chaises dans le coin le plus joli qui avait des arbres derrière.
Au moment de la photo, c’était toujours un peu le bordel, il fallait mettre les grands derrière et les petits devant et puis se décaler un peu pour que tout le monde puisse tenir sur la photo.
Le monsieur qui nous prenait en photo était toujours assez rigolo. Je n’ai jamais su si c’était Monsieur Tourte ou Monsieur Petitin ou bien si les affaires des établissements Tourte et Petitin étaient suffisamment prospères pour leur permettre d’envoyer leurs sous-fifres aligner les enfants dans les cours de récréation de France en empochant les bénéfices du fond de leur bureau confortable.
Parfois on avait la lourde responsabilité de tenir l’ardoise, ce qui donnait un air un peu plus crispé que les autres sur la photo.
Quand on était un "t" comme moi (ceux dont le nom de famille commence par un "t") la photo de classe était l’unique chance de tenir l’ardoise car le jour des photos individuelles, seuls les "a" pouvaient prétendre à ce privilège.
On ne le savait pas à l’époque, mais cette ardoise permettrait des années plus tard de retrouver sur Internet les photos de classe de ses collègues de bureau et de se moquer de leur sous-pull en acrylique pendant la pause à la machine à café.
Ce week-end constitue le point d’orgue d’un projet au travail sur lequel nous travaillons depuis des mois, ce qui me laisse assez peu de temps pour dormir ou alimenter ce blog (en ce qui concerne ma propre alimentation ça va, les plateaux repas sont plutôt pas mal).
Je prends quand même le temps de rédiger un tit billet, avec une tite musique que j’aime bien et une photo de colibri, en me disant que le tout fera un chouette interlude.
A la télé, ça n'existe plus les interludes et c'est dommage. Dans cette industrie, tout est maintenant calé à la microseconde. Perdre une demi minute d’antenne engendrerait un manque à gagner significatif intolérable.
Dans la vie non plus ça n’existe plus les interludes, sauf peut être dans les avions que n’atteignent pas encore les ondes des téléphones portable, mais quelquechose me dit que ça ne durera pas.
Je me demande même si à force ce mot ne va pas finir par être retiré du dictionnaire.
Il est toujours amusant de remettre les pieds dans une école à l’occasion d’un dimanche d’élection.
S’il y a un peu de monde et qu’il faut faire la queue, on est pas loin de chercher une main pour se mettre en rang par deux pour être prêt à entrer dans la bâtiment quand la cloche retentira.
Ce qui est étonnant c’est que les cours de récréation n’ont pas tellement changé. On note cependant un progrès notable : la marelle est maintenant peinte sur le bitume et plus dessinée à la craie.
Mais au fait y a t’il encore des craies dans les écoles ? Ou bien est-ce que les feutres velleda et les présentations powerpoint ont eu raison des grosses boites carrées, de la poussière et des grincements sur le tableau ?
Est ce que les textos ont remplacé le petit mot annonçant la présence d’empreintes de pieds au plafond, que l'on faisait passer discrètement et dont on pouvait suivre la progression en observant un vague de levés de tête parcourant la classe.
C’est chouette cette impression d’avoir fait un bond dans le temps. Pour un peu on se lancerait dans une partie de marelle en sortant du bureau de vote, seulement voilà pour cela il faudrait un caillou, et je crois bien que mes cailloux à marelle sont dans un carton à la cave.