Jérémie Kisling est un chanteur suisse épatant que j’aime beaucoup, un garçon qui fait des chansons qui parfois donnent la chair de poule quand on en écoute les paroles.
Hier soir Jérémie Kisling était sur la scène du cinéma "Le village" à Neuilly et nous dans les fauteuils moelleux du même cinéma. Ce qui est bien pour un chanteur suisse dans le fait de se produire à Neuilly c’est qu’il n’est pas trop dépaysé :
A Neuilly hier soir, il n’y avait personne dans les rues.
A Neuilly hier soir, il n’y avait pas une crotte de chien à plus de 5 centimètres d’un arbre. Je pense qu'à Neuilly il y a des chiens policiers, qui dressent des PV aux chiens pas policiers qui posent des crottes dans les endroits non règlementaires.
A Neuilly hier soir, dans le cinéma il y avait des vieux beaux avec des veilles moches emperlousées qui s’étaient sans doute trompés de soir et qui pensaient assister à un diaporama débat organisé par le Lyon's club.
A Neuilly hier soir, il y eu ce truc magique qu’il y a parfois dans les concerts.
A Neuilly hier soir, après la musique, il y avait ce chanteur rieur, un peu timide, qui signait des affiches, des CD, qui parlait au gens.
Jérémie Kisling est un chanteur suisse épatant que j’aime beaucoup.
Jérémie Kisling - J'suis plus jaloux, j'm'en fous.
Je me suis souvent demandé à quoi ressemblerait notre vie si la terre avait décidé de tourner dans le sens inverse de son sens de rotation actuel. Il y aurait bien sur des conséquences sur le temps : tout serait à l'envers, les montres tourneraient probablement dans le sens inverse des aiguilles d'une montre et le Japon verrait le jour se lever après tout le monde sur la planète. Mais est-ce que pour autant les habitants du pays du soleil couchant se mettraient à porter des chemises à fleurs comme le font les californiens ?
La force de Coriolis serait inversée. Cela ne bouleverserait pas nos existences mais les éviers se videraient à l'envers ce qui serait assez déstabilisant.
De façon générale, je me suis souvent demandé pourquoi dans notre monde les miroirs inversent la droite et la gauche, et jamais le haut avec le bas ? Pourquoi la grande majorité des êtres vivants possèdent un axe de symétrie longitudinale (symétrie pourtant très imparfaite) et pas dans l'autre sens (je dois avouer que je n'arrive pas à retrouver l'adjectif opposé à longitudinal).
Au delà de ce constat, existe t-il des mondes dans lesquel les miroirs auraient fait le choix d'inverser le haut et le bas et où les êtres vivants auraient tous un axe de symetrie transverse ? Voilà c'est ça, le contraire de longitudinal c'est transverse.
Ce qui est sûr c'est que dans un monde comme ça, ça ne doit pas être très simple pour se raser le matin.
Peut être que dans ce monde d'ailleurs, il y a type qui est en train de terminer d'écrire un billet avec les doigts d'une main et d'un pied, en se demandant pourquoi diable dans son monde, les miroirs inversent le haut et le bas et pas le contraire.
Il est toujours un peu angoissant de voir veillir les chanteurs qui ont marqué notre adolescence et réaliser par exemple que Jean-Jacques Goldman a fété ses 55 ans, qu'Etienne Daho a compté 51 bougies sur son dernier gâteau d'anniversaire ou bien que Jordy sera en âge d'aller voter aux prochaines élections présidentielles (encore que l'emploi de l'expression "marqué notre adolescence" dans le cas de Jordy est peut être un peu exagéré).
En fait on aurait envie que, comme pour Tintin, le temps n'ait pas d'emprise sur les artisans de la bande originale de notre vie.
L'étonnement est encore plus fort pour ceux que l'on ne voit pas vieillir et qui réapparaissent par accident. C'est le cas par exemple de Dorothée, recemment venue partager le canapé de Drucker avec Chantal Goya dont je n'ose même pas aller chercher la date de naissance dans wikipedia.
En fait la seule solution pour un artiste de ne jamais donner cette impression là, c'est de mourir jeune : personne n'a jamais dit de Marylin Monroe ou de James Dean qu'il vieillissaient mal.
Mais dans ce cas, pour que la légende reste intacte, il faut aussi prendre soin de faire disparaître son entourage. C'est la conclusion à laquelle je suis arrivé en regardant un reportage sur la vie dissolue de l'acteur rebelle dans lequel était interviewé un ancien petit copain de l'acteur. L'ex-amant, septuagénaire et sans doute incontinent, répondait aux questions du journaliste dans une chemise à fleur improbable que seuls sont capables de porter les retraités américains residant en floride.
Je dois dire que cette expérience télévisuelle a quelque peu écorné l'image de bogosse absolu que j'avais jusqu'alors de l'acteur.
Michel Delpech & Alain Souchon - Quand j'étais chanteur
J'ai parfois l'impression que la génération Casimir à laquelle j'appartiens, est une génération "pas de bol", faite d'individus nés un peu trop tôt ou un peu trop tard.
Bien sûr chaque époque a été marquée par des périodes plus ou moins faciles, plus ou moins heureuses : nos parents ou grands-parents ont connu la guerre, et ça ne devait pas être très rigolo, mais en même temps, après il y a eu cet espèce d'élan euphorique, ce sentiment que tout redevenait possible, qui fait qu'on se met à faire des bébés, plein de bébés qui ont le bon goût des années plus tard de financer les retraites.
Quelques années plus tard il y a eu la guerre froide, la peur de l'escalade, danser toute la nuit en attendant la bombe, mais bientôt le pouvoir des fleurs et puis le sexe facile et sans risque avec tout le monde, tout le temps... Certes notre enfance était insouciante : nous nous vautrions en pyjama sur le canapé familial devant les animaux du monde en dévorant des tablettes de chocolat Poulain, non sans prendre soin au préalable de détacher consciencieusment la vignette collectionnable du papier alu afin de la déposer solennellement dans l'album fourni à cet effet par la maison Poulain en échange de quelques timbres poste. Mais très vite, il nous a fallu affronter le sida, le chômage, les plans sociaux, la mondialisation, le 11 septembre, les 2be3, Lorie, Arlette Chabot et la ligne 13.
Avec toujours cette certitude que la période de la retraite, dont on ne sait pas trop si on l'atteindra vivant, à 70 ou 80 ans, ne sera pas simple à financer et nous conduira peut être à aller chercher un petit boulot chez MacDo.
Non vraiment comme le dit ma coiffeuse, ce qu'il nous faudrait c'est une bonne guerre.
Et si un jour mon nouveau travail et mon agenda de pétasse que j'ai ne me laissaient pas assez de temps pour rédiger un billet ?
Alors je crois bien que je choisirai le premier sujet insignifiant qui me tomberait sous la main, ou bien même pas de sujet du tout.
Après je prendrai soin de construire des phrases interminables dont le seul but sera de faire oublier le manque de préparation d'un billet absolu dans lequel l'emploi excessif d'adjectifs opportuns donnera l'impression d'une construction méthodique.
Peut être même que je ferais en sorte d'employer par hasard un conditionnel présent au milieu des futurs simple (et aussi d'oublier au passage un pluriel) afin de semer un doute grammatical dans l'esprit des lecteurs, les poussant à tenter de retrouver leur bon vieux Bled aux confins de la bibliothèque au lieu de s'interroger sur le fond de ce billet.
Ensuite j'illustrerai à moindre effort à l'aide d'une photo sans doute déjà publiée ici (je ne prendrai même pas le temps de vérifier), spéculant sur le fait que personne ne s'en rappellera suffisament pour être déçu.
Il ne restera plus alors qu'à ajouter un morceau de musique dont on aura l'impression qu'il s'accorde à l'image, masquant ainsi un manque de travail certain par l'évocation d'une nostalgie facile.
Après il sera déjà tard et j'irai me coucher, non sans promettre de consacrer bientôt davantage de temps à l'écriture d'un nouveau billet, provoquant ainsi chez le lecteur le début d'une attente insupportable.
Les aéroports américains sont des écosystèmes fascinants.
Nous sommes jeudi soir, mon Pc et moi attendons sagement notre avion, assis sur une banquettre près de la porte A17 du terminal A de l'aéroport International de Philadelphie.
Nous contemplons le ballet des voiturettes électriques probablement évadées du golf le plus proche. Ces engins permettent à des américains trop gros, trop handicapés ou juste fainéants, de rejoindre leur porte d’embarquement en affichant un air supérieur. Pour la première fois je vois passer un modèle de voiturette estampillée d'un magnifique logo Police. Je pense que l’utilisation de ce moyen de transport par les forces de l’ordre aéroportuaire doit donner lieu à des courses poursuites tout-à-fait spectaculaires.
Sur les longs tapis roulants du terminal, des businessmen grassouillets en polo de golf pourri sont scotchés à leur portable dans l'attente d'un avion qui les ramènera chez eux : à Akron, à Colombus, à Greensboro ou à Raleigh.
Je m'interroge sur ce phénomène étrange qui existe ici, qui fait qu’aux alentours de l’âge de trente ans, les bogosses athlétiques genre pub pour slips de salope, se métamorphosent en businessmen grassouillets en polo de golf pourri.
A coté de moi, un type s’est installé et a sorti sa guitare, il gratte en silence, et au fond de moi je me dis que s’il avait décidé d’apprendre les cymbales plutôt que la guitare, l’atmosphère devant la porte A17 aurait été toute différente.
Quand on entre dans un avion d’une compagnie étrangère on a instantanément l’impression de se trouver déjà dans cet autre pays. Le même phénomène est observé quand on entre dans un avion d’Air France se trouvant au bout du monde.
C’est également le cas dans cet A330 d’US Airways dans lequel je viens de m’installer.
Ici déjà des hôtesses usées à qui le décalage horaire ne fait plus rien.
Ici déjà, des businessmen bedonnants qui parlent fort et qui portent des polos de golf pourris.
Ici déjà une pauvre tranche de saumon, à qui le décalage horaire ne fait plus rien.
Ici déjà des bonbons à la menthe senteur Harpic ou cannelle.
Ici déjà des annonces en phonétique et ce regard vide quand vous parlez français.
Ici déjà pas de sourire jamais, les hôtesses d’US Airways ont arrêté de sourire en 1984, le jour où on leur a annoncé qu’on avait décidé d’utiliser l’argent destiné à leur retraite pour acheter des pièces de rechange aux avions.
Sur la route de l’aéroport ce matin j'ai vu des jonquilles presque en fleur sur le balcon. Depuis quelques semaines, elles sont persuadées que c’est le printemps. Insouciantes comme des paquerettes, elles sont loin de se douter que la semaine qui démarre sera polaire. Hier soir, j’ai coupé le son de la méteo de Catherine Laborde pour ne pas leur casser le moral.
A l’approche du terminal 1, le taxi se retrouve nez a nez avec un concorde empaillé. Plus loin quelques avions de compagnies exotiques : Air Vietnam, Air mauritius…L’avantage de ce terminal par rapport à l’autre (le terminal 2, celui qui est confortable, celui duquel partent les avions d’Air France aux quatre coins du globe, celui que j’aime bien) c’est que l’on sait au premier coup d’œil d’où viennent et où vont tous les avions.
Après une fois qu’on est dedans, le terminal 1, c’est tout rond, tout moche, tout bondé.
Il nous est tous arrivé (et à moi encore hier), de nous retrouver dans un métro bondé et immobile, refusant d’avancer vers la station suivante au motif de la présence d’un voyageur malade sur le quai. Et je me suis a chaque fois demandé en quoi un voyageur malade sur le quai de la station d'après pouvait être une justification de l’immobilité d’une rame de métro à la station d'avant.
De la même façon dans les aéroports, je suis à chaque fois étonné que l’arrivée tardive de l’appareil puisse constituer une excuse valable au retard de l'avion qu'on attend.
Finalement c’est un peu comme si on arrivait à la bourre au boulot à cause d’une panne d’oreiller et qu’on se justifait d’un "Excusez moi hein, mais je suis en retard parce que je suis parti tard de chez moi, vous voyez je ne suis pas responsable, je n’y suis pour rien" Ceci étant dit ce type d’excuse foireuse peut se révéler fort utile dans le travail. Si l'on est très en retard dans la publication d'un rapport, on pourra se réfugier derrière un moderne : "Je te l'ai envoyé par mail, tu ne l'as pas reçu ? Ah oui il me semble avoir reçu un message qui me disait que ta boite mail était pleine" qui a remplacé le "Il est à la frappe" maintenant démodé mais qui a fait ses preuves pendant des années.
Et puis si l’on est vraiment coincé il y toujours le "Vous ne m’avez pas relancé, je pensais que vous n’en aviez plus besoin", imparable.
Le travail m'a souvent amené en Allemagne, ce qui quand on y pense me fait un point commun avec mon grand père sauf que moi je m'y suis à chaque fois rendu à peu près de mon plein grès.
Je dis à peu près car je n'ai jamais été tellement fan d'aller en Allemagne. D'abord en général l'Allemagne ça commence tôt le matin : il faut prendre l'avion de 7 heures, celui qui est plein à craquer et dans lequel les gens s'énervent.
Une grosse heure plus tard, on arrive à Dusseldorf, à Francfort ou ailleurs. On sort de l'aéroport, (en général il pleut) il y a des taxis jaune pâle partout. A chaque fois, on a l'impression de se retrouver prisonnier d'un épisode de Derrick en version originale, ce qui est encore pire que la version française car on y parle Allemand (Au passage je ne comprends pas que l'on ait pu inventer une langue pareille ou même que l'on puisse avoir envie de l'apprendre à ses enfants).
Après on passera beaucoup de temps en voiture (en général une mercedes trop puissante ) conduite trop vite par un collègue Allemand qui vous aidera immanquablement à chercher un truc dans la boite à gant tout en maintenant la vitesse de son bolide à 240 km/h.
Le plus souvent, la population germanique étant moyennement familière avec le concept de pause déjeuner, il faut négocier âprement l'engloutissage rapide de quelques patates à la sauce dans un restaurant d'autoroute dans lequel on pourra, au contact de la population locale, délecter ses tympans de l'écoute des sonorités magiques de cette langue tellement mélodieuse.
Plus tard encore, on reprendra l'avion dans l'autre sens, on constatera avec tristesse qu'il n'y a pas un seul journal francais à bord (nous sommes sur un vol Lufthansa), on se fera la reflexion que cette compagnie pourrait faire d'énormes économies de kérozène en prenant des hotesses plus maigres et en leur faisant s'épiler les jambes...
Pendant tout le vol, on se livrera à ce jeu idiot de remercier à tord et à travers les hotesses, amusé que l'on est de s'entendre systématiquement répondre bitte à peine à t'on fini de prononcer le mot danke.