Quand on voyage en Asie et notamment au Japon, que ça soit en train en métro ou en avion, il n’est pas rare d’être le seul occidental dans le moyen de transport en question. Ceci a principalement deux conséquences, l’une de dépasser toujours l'assemblée d’au moins une tête, l’autre de se sentir observé un peu comme pourrait l’être un martien fraîchement descendu de sa soucoupe.
Les Asiatiques ont cette capacité à vous dévisager du coin de l’œil, à vous observer sans jamais donner l’impression de vous regarder. Je pense que cette technique s’apprend à l’école après l’age de huit ans car les petits enfants, eux, vous dévisagent carrément, avec un air mi-curieux mi inquiet.
Aujourd’hui je voyage en avion entre la Chine et le Japon dans un boeing 767 de la JAL.
C’est toujours rigolo les vols intérieurs au Japon.
D’abord la file d’attente rectiligne, impeccable, un peu comme si la mise en place des gens avait été répétée mille fois, comme si l’emplacement de chacun était marqué avec des petits morceaux de scotch blanc phosphorescents, comme au théâtre.
Ensuite les démonstrations de sécurité récitées dans un anglais improbable par une hôtesse strapontée déchifrant avec peine son annonce phonétique.
Au moment où l’avion roule sur le tarmac il tombe des cordes, pluie tropicale n’arrivant sans doute pas à faire passer le thermomètre sous la barre des 38 degrés.
Au décollage, je suis hypnotisé par le ballet des grandes bandes blanches peintes sur la piste d’envol qui défilent à toute vitesse sur les télés dans la cabine. Ces images proviennent d’une petite caméra située dans le nez de l’avion, gadget inutile mais tellement excitant. Il paraît qu’air France a equipé certains avions récents de ce système mais le déconnecte à l’atterrissage car des gens se sont plaints que ça leur faisait peur, moi j’adore de truc.
J’ai toujours une petite angoisse à chaque fois quand le commandant fait une annonce dans une langue que je ne comprends pas, en l'occurence en japonais. Je me demande dans quelle mesure il n’est pas en train de nous informer d’un drame imminent, peut être son annonce dit-elle en substance : « Vénérables passagers, suite à une regrettable erreur de pilotage de ma part, il m’est pénible de vous annoncer que nous perdons tout notre carburant et que nous allons sans doute nous écraser bientôt après une vertigineuse chute. Je vous prie de vouloir me pardonner pour cette erreur impardonnable que j’ai commise en raison de mon incompétence, je vous prie aussi de m’excuser d’avoir troublé la quiétude de votre repas par cette dérangeante annonce que je vous remercie beaucoup d’avoir bien voulu avoir l’infinie patience d’écouter. Je vous remercie beaucoup beaucoup beaucoup, je vous remercie vraiment."
Par chance, il me semble deviner à l’écoute de la version presque anglaise qu’il nous annonce que nous débutons notre descente vers l’aéroport de Narita et qu’on est priés de ranger les ordinateurs portables, de relever le dossier et la tablette de notre siège et de mettre fin à la rédaction de ce billet.