Depuis toujours, l’homme comme la chat est à la recherche de la bonne place.
Ainsi, le chat se préfère vautré sur un fauteuil moelleux ou étendu sur un bout de terrasse chauffé par le soleil. L’homme lui, a pendant des millénaires recherché à occuper l’emplacement près du feu et le plus loin possible des lions des cavernes.
Maintenant que l’homme est moins vulnérable aux lions des cavernes, être à la bonne place c’est par exemple barboter dans ce jacuzzi en regardant la neige qui tombe à gros flocons dehors, occuper le siège 4 F dans le nez d'un 747 d’Air France, fauteuil absolu dans lequel vous n’avez aucun voisin et dans lequel vous n’êtes gêné par rien aussi loin que vous tendiez le pied. Posséder le siège 4F c’est un peu comme être enfoncé dans un fauteuil club au milieu de son salon, la télécommande sur les genoux.
La bonne place c’est encore la terrasse de la Samaritaine avec une vue improbable sur Paris, endroit regretté qui était souvent désert le soir en hiver. Il y faisait alors nuit et Paris est encore plus joli sous la nuit.
C’était aussi cette place dans la salle de cours au lycée, dans l’angle mort du prof, où on ne se faisait jamais interroger.
Parfois être à la bonne place c’est simplement profiter d’une situation un peu plus confortable que celle de ses congénères : être celui dans la file de la caisse au supermarché à qui la caissière lance un « dites aux autres personnes qu’après vous c’est fermé », occuper cette place normale au cinéma qui devient parfaite après qu’un nain soit venu s’asseoir sur le fauteuil de devant.
Mais dans le monde moderne, comme dans le monde des cavernes, il faut être malin et rapide pour conquérir puis conserver cette bonne place. Un moment d’inattention, un faux pas et on se retrouve avant de s’en apercevoir à la mauvaise place.