Voyager vers l’Ouest est facile, il suffit de suivre le soleil. A l’arrivée on ressent comme une petite fatigue, mais déjà il est l’heure de se coucher. On se réveillera le lendemain à l’aube avec l’énergie que l’on aurait s’il était midi (d’ailleurs il est midi). Alors on en profite pour se promener fièrement dans une ville américaine, endormie.
Voyager vers l’Est est plus compliqué, plus douloureux. On ne franchit pas impunément les frontières de l’espace temps, on paye au retour cette énergie matinale surprenante.
Au retour des Amériques, on ne sait plus, si on a faim, si on a soif, si on a envie de dormir, de ne pas dormir. On est prisonnier d’un état second impossible à décrire. Parfois on est saisi d’une fringale à une heure idiote, parfois on est habité de la plus profonde indifférence par rapport au fait qu’il pourrait être l’heure de manger.
Quand on rentre des Amériques on est incapable d’avoir une conversation cohérente.
Quand on rentre des Amériques, on est d’une maladresse absolue, une fois j’ai fait tomber une télé en m’en rendant à peine compte.
Quand on rentre des Amériques, tous les objets sont potentiellement dangereux.
Quand on rentre des Amériques, il faut compter scrupuleusement les moutons, et ne pas trop penser que les vacances sont finies.
Robert Charlebois - Je reviendrai à Montréal